PALESTINE – Trump n’était pas le bon choix ; Hillary non plus…

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Trump s’est clairement positionné dans une ligne anti-palestinienne. Et alors ?

L’élection de Donald Trump, quarante-cinquième président des États-Unis, a suscité beaucoup de réactions dans le monde entier, notamment après sa compagne électorale et ses idées affichées d’un nationalisme de droite décomplexé.

C’est vrai, la démocratie, de nos jours, donne des résultats étranges ; et, aux États-Unis, les extrémistes ne cessent de s’affirmer.

Sa victoire-surprise, qualifiée de « séisme américain », va être suivie de répliques dans beaucoup de pays, en particulier en Europe, à commencer par la France, où les élections présidentielles et législatives se caractériseront sans doute par la montée de la droite et de l’extrême-droite.

Héritier monstrueux des années Bush, Donald Trump est l’épisode le plus spectaculaire d’un cycle mondial qui voit s’imposer les replis identitaires et les nationalismes, sur fond de bruits de guerre.

Concernant la politique extérieur du nouveau président, en particulier au Proche-Orient, Trump a répété plusieurs fois qu’il soutiendrait inconditionnellement Israël, « la seule démocratie dans cette région en pleine mutation ». Parmi les conseillers politiques de Trump, beaucoup sont d’ailleurs pro-israéliens, et connus pour leur position anti-arabe ; cela ne donne plus beaucoup de chance au processus de paix entre Palestiniens et Israéliens, déjà mis en plein échec depuis des années.

Cela dit, même si un sentiment d’inquiétude accrue règne dans les territoires palestiniens du fait de l’arrivée d’un Trump à la Maison blanche, les Palestiniens, en général, ne comptaient déjà plus beaucoup sur les Américains : qu’ils aient été du camp démocrate ou du camp républicain, la politique des présidents américain a toujours été celle d’un soutien sans faille à l’occupation israélienne, insouciants du droit international et des violations permanentes des droits des Palestiniens.

Trump sera simplement un peu pire que ses prédécesseurs…

De leur côté, les dirigeants israéliens ont applaudi la victoire de Donald Trump. Le premier ministre israélien Netanyahou  a félicité le nouveau président, le gratifiant d’une épithète appropriée : « véritable ami d’Israël ». Il a accueilli l’élection de ce président comme une bonne nouvelle pour Israël, qui permettra l’accélération de la colonisation dans les territoires palestiniens, d’une part, et, d’autre part, la poursuivre, débarrassée des quelques réserves qu’avait au moins formulées l’administration Obama, d’une politique de fermeté et de répression à l’encontre de la résistance populaire qui a récemment émergé parmi les jeunes Palestiniens. Dans les colonies et à Jérusalem, les homologues israéliens des racistes américains célèbrent aujourd’hui la victoire de Trump…

« Je suis certain que le nouveau président Trump et moi-même continueront à renforcer l’alliance entre nos deux pays et la feront encore progresser », a ajouté le premier ministre israélien, le sourire satisfait. « La victoire de Trump est une opportunité pour Israël de mettre un terme à l’idée d’un État palestinien au centre du pays, qui nuirait à notre sécurité et notre juste cause », a-t-il conclu.

Pendant la primaire des républicains, Trump s’est vendu au lobby sioniste ultra-puissant aux États-Unis comme un allié violemment et va-t-en-guerre du premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, contre le peuple palestinien. Il a juré qu’il ferait de la lutte contre le mouvement non-violent mené en faveur des Palestiniens, le « boycott, désinvestissement et sanctions » (BDS), une priorité de sa politique de soutien à Israël. Il a tout fait, déjà, pour mener campagne contre les mesures les plus douces mises en œuvre pour dénoncer la responsabilité d’Israël dans les massacres de Gaza et la violation du droit onusien ; il est allé jusqu’à en appeler directement aux membres de son église, pour qu’ils s’opposent au désinvestissement de sociétés qui soutiennent l’occupation israélienne et en tirent profit. Il a promis à Netanyahu qu’il reconnaîtrait Jérusalem comme « capitale une et indivisible de l’État d’Israël » et a encouragé Israël à poursuivre ses constructions dans les colonies de Cisjordanie occupée. Qui voulait savoir s’il suivrait la « tradition » des autres candidats républicains et se rendrait en Israël ?

Peut-être sera-ce difficile pour Trump de transférer l’ambassade américaine de Tel-Aviv à Jérusalem, comme il l’a promis, et d’imposer une « paix juste » entre Palestiniens et Israéliens à sa manière ; mais le président américain ne manquera pas de soutenir publiquement la politique israélienne et défendre le point de vue israélien à l’échelle internationale. La période de Trump sera donc un temps de souffrance accrue pour les Palestiniens, qui continueront vainement de travailler leur diplomatie afin de convaincre la nouvelle direction américaine d’avoir une position plus ou moins objective dans le conflit israélo-palestinien… Sur le terrain, les acteurs palestiniens seront obligés de faire preuve d’une politique très ferme à l’encontre des résistants et de ceux qui  s’opposent désormais ouvertement à un processus de paix qui a dupé la nation palestinienne depuis des décennies ; il s’agira en effet de ne pas prêter le flanc aux critiques qui permettraient à la nouvelle administration américaine et à l’armée israélienne de justifier tout et n’importe quoi.

Hilary Clinton était-elle la candidate du camp palestinien ? Elle n’aurait pas été une présidente amie des Palestiniens… Les démocrates ne sont pas beaucoup plus intentionnés à l’égard de la cause palestinienne, parce qu’ils ne sont pas plus libres d’agir que les républicains : il ne faut pas oublier que le président sortant Barack Obama a déçu les Palestiniens ; en 2011, sous la pression du lobby sioniste américain, il a dû céder aux exigences du gouvernement israélien qui a imposé à Washington de mettre son veto à la reconnaissance de la Palestine par l’ONU. On a vu le flamboyant discoureur du Caire se changer en un zombie, le visage grimaçant, soumis aux intérêts israéliens, et apparaître devant les caméras de télévision à côté de Benjamin Netanyahu qui arborait un sourire vainqueur. En outre, le démocrate a fini son mandat en accordant sans réserve à Israël l’aide militaire la plus importante de toute l’histoire des relations américano-israéliennes, pour un montant de 38 milliards de dollars…

Comme on dit en Palestine : « La différence entre démocrates et républicains aux USA, c’est comme la différence entre Pepsi et Coca-Cola. Ça change un peu de goût, mais c’est le même poison. »

Même si les dernières élections révèlent un homme imprévisible, sans opinions stables, les positions très pro-israéliennes de Trump ne font quant à elles aucun doute et ne diffèrent pas beaucoup, en substance, de la politique qu’a menée Obama dans ce dossier, sous le contrôle duquel la construction de colonies a fait plus que garder le rythme qu’elle avait sous le président Georges W. Bush ; elle s’est accélérée.

La soi-disant solution à deux États est déjà morte depuis longtemps…

La cause palestinienne s’est transformée en lutte pour l’égalité contre un système israélien solidement établi d’occupation, de colonisation, de peuplement et d’apartheid. Il est  ancré et enraciné dans le soutien de l’establishment dans les deux partis américains ; et les Palestiniens n’attendaient pas le résultat de l’élection américaine pour décider de la direction de leur combat.

Un peu d’espoir, cependant ? Trump a gagné, mais un certain nombre de choses n’ont pas changé. Au cours des dix dernières années, le soutien aux droits des Palestiniens a progressé aux États-Unis, particulièrement chez les jeunes et dans la base de plus en plus diverse du parti démocrate, complètement délaissée par sa direction bien installée. Plus que jamais, les gens comprennent que le soutien américain à Israël est le fait de milieux qui prônent la suprématie blanche et soutiennent l’incarcération de masse, la violence incontrôlée de la police et le militarisme.

Afin d’affronter les années difficiles de Trump et son soutien à Israël, les Palestiniens devraient réviser leur politique et surtout s’unifier, mettre fin à leurs divisions partisanes et fratricides.

Peut-être le durcissement de la répression israélienne et l’intensification des vexations et frustrations à l’encontre des Palestiniens que les années Trump engendreront pousseront-ils enfin ces derniers à se mettre d’accord une bonne fois, sur une seule forme efficace pour résister contre l’occupation et la colonisation… et pour gagner de plus en plus d’amis solidaires de leur cause de justice, partout dans le monde, y compris dans les États-Unis de Trump.

 

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Ziad Medoukh

Directeur du Département de langue française à l'Université Al-Aqsa de Gaza (Territoires Autonomes Palestiniens)

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