ÉTAT ISLAMIQUE – L’étrange Charia de l’État islamique…

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Règles juridiques Islam sunniteDepuis 2013, l’organisation appelée en arabe « DAECH » revendique le statut d’État et se réclame explicitement de l’Islam en se faisant appeler « État islamique ». Pour appuyer ses revendications farfelues, elle prétend appliquer la Charia sur les territoires qui sont sous son contrôle au nord de la Syrie et en Irak. Or, cette prétention ne résiste pas à l’examen des faits, y compris d’un point de vue strictement théologique.

D’al-Qaïda à « Ansar al-Charia »

Depuis la mort de Ben Laden en plein « printemps arabe » (2 mai 2011), l’idée du « jihad » en tant qu’idéologie de lutte armée a cédé le pas face à une idée nouvelle et plus forte, qui a immédiatement prospéré sur le terrain et dans les esprits : il s’agit de la « Charia ». Ainsi, l’on a vu se multiplier les groupes portant le nom d’« Ansar al-Charia » (« Partisans » ou « Défenseurs de la Charia »), un peu partout dans le monde arabe. De la Tunisie au Yémen, en passant par la Libye et l’Égypte, tous ces groupes n’appelaient plus au « jihad pour le jihad », objectif nihiliste s’il en est, mais au « jihad pour la Charia », c’est-à-dire pour l’instauration d’un « État islamique » appliquant les prescriptions coraniques et les traditions prophétiques de façon littérale et anachronique.

Ces « partisans de la Charia » n’ont pas lâché prise, ils se battent toujours en Libye et ailleurs pour un retour à la « loi divine » et rivalisent de propositions pour son application stricte et immédiate. Ils hésitent simplement sur les modalités pratiques d’y parvenir, et ce sont d’abord leurs différends idéologiques qui ont fait échouer, jusqu’ici, le projet d’un « État islamique » qui s’étendrait sur l’Afrique du Nord et le Sahel, mais aussi sur le Proche et le Moyen-Orient, en prenant la forme d’un « califat » panislamique.

Il faut néanmoins rappeler ce qu’est la « Charia ». Le mot est issu de la racine arabe « š.r.‘a » qui indique la voie ou le chemin suivi par quelqu’un. On retrouve ce sens dans le mot arabe moderne de « châri‘ », qui signifie la rue, parfois l’avenue comme dans « Châri’ Habib Bourguiba » à Tunis, haut lieu de la révolution tunisienne en 2011. Mais, dans le discours des théologiens, la Charia désigne les lois et règlements dérivés du Coran et du Hadith et régissant la vie des musulmans. Elle est étroitement associée à la notion de fiqh qui renvoie à la discussion académique sur l’esprit des lois divines.

Dans le Coran, le mot « charia » apparaît une seule fois (16 : 18) : « Nous vous avons mis sur une charia d’ordre, alors suivez-là ! ». De cet ordre explicite provient l’insistance des islamistes sur l’obligation de suivre la Charia et de mettre en application les prescriptions divines. Le verbe chara‘a apparaît, quant à lui, deux fois pour indiquer la voie établie par Dieu (la religion) : « Il vous a établi comme religion... » (42 : 13) ou encore « Ils leur ont établi comme religion... » (7 : 163).

Dans le corpus prophétique du Hadith, le mot « charia » apparaît une seule fois, selon le Musnad d’Ibn Hanbal. Le prophète Mahomet aurait dit : « La communauté demeurera fidèle à la charia tant qu’elle ne sera pas affectée par trois maux : la disparition de la science, la multiplication des bâtards et le règne des persifleurs. » Le verbe apparaît également une seule fois dans un hadith aux multiples variantes : « Dieu a établi (chara‘a) pour Son Prophète les règles de conduite. »

Étant donné la rareté du terme, ce n’est donc pas dans le Coran ni chez le Prophète qu’il faut chercher le sens précis de ce que recouvre la Charia, mais dans le travail exégétique et apologétique ultérieur, qui a été mené par les oulémas musulmans à partir de l’histoire et de la pratique des autorités politiques et religieuses du début de l’Islam, en particulier des quatre premiers califes (632-661).

À noter que le mot « charia » est employé à la même époque, en arabe, pour désigner la Torah, appelée alors « Charia de Moïse ». Il est également employé par les Arabes chrétiens pour désigner l’Évangile, appelé « Charia du Messie ». Ce n’est donc pas un usage spécifiquement musulman : le mot désigne initialement toute réflexion législative issue des religions monothéistes.

C’est le cas de la « Loi du Talion » à laquelle se réfèrent les trois religions révélées. Dans le Judaïsme (Torah), la formule « œil pour œil, dent pour dent » revient trois fois dans le Pentateuque : « Mais si malheur arrive, tu paieras vie pour vie, œil pour œil, dent pour dent, main pour main, pied pour pied, brûlure pour brûlure, blessure pour blessure, meurtrissure pour meurtrissure. » (Exode 21, 23-25) « Si un homme frappe à mort un être humain, quel qu’il soit, il sera mis à mort. S’il frappe à mort un animal, il le remplacera — vie pour vie. Si un homme provoque une infirmité chez un autre homme, on lui fera ce qu’il a fait : fracture pour fracture, œil pour œil, dent pour dent ; on provoquera chez lui la même infirmité qu’il a provoquée chez l’autre. Qui frappe un animal doit rembourser ; qui tue un homme est mis à mort. Vous aurez une seule législation : la même pour l’émigré et pour l’indigène. » (Lévitique, 24, 17-22). « Ton œil sera sans pitié : vie pour vie, œil pour œil, dent pour dent, main pour main, pied pour pied. » (Deutéronome, 19, 21)

Dans le Christianisme, Jésus se prononce dans le Nouveau Testament contre la loi du Talion et recommande de s’y opposer : « Vous avez appris qu’il a été dit : ‘œil pour œil et dent pour dent’. Et moi, je vous dis de ne pas résister au méchant. Au contraire, si quelqu’un te gifle sur la joue droite, tends-lui aussi l’autre. À qui veut te mener devant le juge pour prendre ta tunique, laisse aussi ton manteau. Si quelqu’un te force à faire mille pas, fais-en deux mille avec lui. À qui te demande, donne ; à qui veut t’emprunter, ne tourne pas le dos. » (Matthieu 5, 38-4)

En Islam, le Coran retourne à la règle énoncée par la Bible et l’exprime ainsi : « Ô Croyants ! On vous a prescrit le talion au sujet des tués : homme libre pour homme libre, esclave pour esclave, femme pour femme. Mais celui à qui son frère aura pardonné en quelque façon doit faire face à une requête convenable et doit payer des dommages de bonne grâce. Ceci est un allègement de la part de votre Seigneur et une miséricorde. Donc, quiconque après cela transgresse, aura un châtiment douloureux. » (2 : 178 et 5 : 44-45)

La charia au fil du temps

Tout au long de l’histoire musulmane, la réflexion et la codification de la Charia s’est faite dans le cadre d’une discipline spécifique appelé fiqh, mot généralement traduit par « législation » ou « jurisprudence ». On trouve ainsi des recueils dénommés en fonction de leur auteur : le fiqh de Mâlik, le fiqh d’Ibn ‘Âbidîn, etc. Les juristes ou jurisconsultes spécialistes du fiqh sont appelés fuqahâ’ ou oulémas. Parfois, les deux mots « charia » et fiqh sont employés comme synonymes mais avec une connotation divine pour le premier (charia) et une connotation humaine pour le second (fiqh).

À la fin du XIXe siècle, le mot qânûn a été introduit dans le vocabulaire arabe pour désigner le droit emprunté à l’usage européen (le canon). L’adjectif islâmi lui a été ensuite associé pour désigner le « droit musulman » en tant que système juridique issu de la Charia et transposé dans des codes modernes.

Les fondateurs des écoles juridiques musulmanes se sont appuyés sur le Coran et sur le Hadith pour construire, par un raisonnement systématique, la pensée et les outils en usage encore aujourd’hui chez les juristes musulmans. La vie et la pratique du prophète Mahomet, appelées sunna, ont été prises comme exemple et comme modèle pour apprécier la manière dont il convenait de vivre la foi et de pratiquer les rites de l’Islam. Cette sunna ou tradition prophétique a été retenue et transmise par les Compagnons du prophète sous forme de récits appelés hadith, transmis de génération en génération, puis consignés dans des ouvrages spécifiques pour nourrir la réflexion juridique.

Mais comme chacun des fondateurs des écoles juridiques vivait ou exerçait dans une ville différente (Damas, La Mecque, Médine, Koufa, Bassora), sa réflexion et son système de pensée juridique ont été influencés par la « tradition vivante » de sa ville d’origine ou d’exercice. Ainsi, l’école juridique de Mâlik – le malikisme, majoritaire au Maghreb – a été influencée par la pratique locale de la ville de Médine, deuxième ville sainte de l’Islam, appelée dâr al-hijra (terre de l’émigration), car elle a accueilli le prophète Mahomet lorsqu’il avait fui sa ville natale, La Mecque.

Par ailleurs, les dynasties musulmanes successives ont eu une influence certaine sur l’élaboration et la codification du droit musulman. Les systèmes juridiques mis en place reflètent largement la pratique et la conception impériale du califat omeyyade (661-750) puis du califat abbasside (750-1258). Au gré des dynasties et des oppositions politiques, les jurisconsultes musulmans ont été sommés de trouver des justifications à la loi dans le texte coranique ou dans les traditions prophétiques.

La Charia sunnite

Le sunnisme (issu du mot sunna, tradition) est le courant de l’Islam le plus répandu puisqu’il regroupe environ 90% des musulmans dans le monde. Ceux-ci sont appelés « Sunnites » (en arabe,sunnî). Ce qui distingue le Sunnisme, ce sont principalement les sources utilisées pour écrire le droit musulman. Les Sunnites s’accordent sur quatre sources de référence : le Coran, livre révélé au prophète de l’Islam, Mahomet. Puis, pour les cas non directement évoqués dans le Coran, les Sunnites recourent en priorité aux paroles (hadith) et aux actes du Prophète (sunna), puis au consensus de ses compagnons (ijmâ‘), puis finalement au raisonnement analogique (qiyâs), à condition qu’il ne contredise pas les trois sources précédentes.

Le Sunnisme se subdivise lui-même en différentes écoles juridiques appelés madâhib (littéralement : « voie, chemin »). Il y en a aujourd’hui quatre, mais il y en a eu beaucoup d’autres dans le passé. Ces écoles ont simplement divergé sur des questions de jurisprudence mais sont unanimes sur les fondements du droit, à savoir le Coran (al-qur’ân), la tradition (as-sunna), le consensus (al-ijmâ‘), la déduction par analogie (al-qiyâs). Les savants sunnites sont ainsi généralement opposés aux interprétations religieuses libérales de certains théologiens anciens ou modernes.

Ces quatre écoles se reconnaissent mutuellement comme valides et véridiques, car les différences qui les caractérisent sont minimes. Elles forment une seule entité : le Sunnisme.

L’école hanafiteest la plus ouverte au niveau des déductions, car elle insiste sur la liberté d’opinion, le jugement personnel et la recherche de la meilleure solution (au cas par cas, en fonction de l’équité et des convenances du moment). Il existe donc, du moins à l’origine, une certaine marge de manœuvre interprétative. Abû Hanîfa insiste sur l’importance des textes et de la tradition. Peu à peu, cette école va perdre de sa capacité à innover et la notion d’ijtihâd (effort d’interprétation) va laisser place à la notion detaqlîd(souci d’imitation). L’école hanafite se retrouve surtout chez les Musulmans turcs, pakistanais, afghans et asiatiques.

L’école malikite privilégie les coutumes et les traditions de Médine à l’époque où Mahomet y vivait. Elle diffère essentiellement des autres écoles juridiques par les sources qu’elle utilise pour déterminer la jurisprudence. Si les quatre écoles utilisent le Coran, la Sunna, ainsi que le consensus et la déduction, le malikisme prend en plus exemple sur les pratiques originelles des habitants de Médine (‘amal ahl al-madîna) comme source de droit. Cette place majeure accordée à la coutume médinoise a favorisé l’acceptation de coutumes populaires rejetées par d’autres courants. L’effort d’interprétation (ijtihâd), d’abord recommandé, est fermé au Xe siècle. L’école est principalement répandue dans les pays d’Afrique du Nord, de la Mauritanie à la Libye. L’Espagne musulmane (al-andalus) était le bastion du Sunnisme malikite au Moyen Âge.

L’école shafiite présente un compromis entre les deux écoles précédentes. Elle valorise la Sunna comme source du droit et insiste sur le consensus (ijmâ‘), mais le point de vue des oulémas l’emporte, écartant par là l’opinion personnelle (ra’y). Elle est particulièrement répandue en Égypte, en Indonésie, en Malaisie, aux Philippines et en Thaïlande.

L’école hanbalite est la plus traditionnaliste des quatre écoles. Majoritaire dans les pays du Golfe persique, notamment en Arabie saoudite, l’école hanbalite a exercé et continue d’exercer une influence intellectuelle importante sur l’ensemble du monde musulman. Elle a donné naissance au salafisme (as-salafiyya) et au wahhabisme (al-wahhâbiyya).

D’autres courants de pensée sont nés, au Moyen Âge, en réponse à certaines questions théologiques comme la nature de Dieu, le libre arbitre ou l’éternité de l’existence. Plusieurs écoles de théologie et de philosophie se sont développées pour répondre à ces questions, chacune prétendant relever de la vraie tradition musulmane.

À partir du XIXe siècle, l’histoire de la Charia a connu un développement rapide. En 1876, les autorités ottomanes promulguent la Majalla, codification partielle du droit sunnite (hanafite) à des fins pratiques. Cette publication initia un grand mouvement de consignation de la Charia sous une forme moderne et innovante. Le réformiste égyptien Muhammad ‘Abduh (mort en 1905) a remis à l’ordre du jour la nécessité de l’ijtihâd, effort personnel d’interprétation et de réflexion juridique visant une adaptation des règles anciennes aux évolutions de la société, en réduisant le poids de la tradition et des écoles juridiques. Ainsi par exemple, la plupart des oulémas ont soutenu l’idée d’une « constitution », même si celle-ci était importée d’Occident.

Tout au long du XXe siècle, les pays arabes se dotent de systèmes juridiques adaptés à la modernité dans lesquels l’héritage de la Charia se trouve concurrencé par l’influence des systèmes occidentaux, excepté dans le domaine du droit de la famille, domaine où la Charia continue d’exercer une influence déterminante sur les sociétés et sur les esprits.

Pendant la première moitié du XXe siècle et en raison du contexte politique particulier des pays arabes (sous colonisation, protectorat ou mandat), les mouvements de libération nationale ont été influencés par la pensée occidentale (révolution française, révolution communiste, socialiste), mais ils sont restés très attachés à l’identité musulmane, en tant qu’élément fédérateur d’opposition à la domination occidentale, et à la Charia, en tant qu’instrument de justice sociale. Dans ce contexte, la Charia a perdu de sa complexité juridique – associée au fiqh – et s’est muée en un concept politique exprimant un système de gouvernement idéal.

C’est dans cette optique qu’il faut comprendre la création des Frères musulmans en Égypte, par Hassan Al-Banna, en 1928, puis d’autres groupes islamistes qui se réclament du jurisconsulte médiéval Ibn Taymiyya (mort en 1328), promoteur d’un retour aux salafs (pieux prédécesseurs). Cet imam a notamment focalisé l’attention des penseurs ultérieurs sur des thématiques spécifiques telles que les peines légales (hudûd), leur donnant une importance disproportionnée, alors qu’elles sont relativement marginales dans la jurisprudence. Il a ainsi ouvert non pas la « porte de l’ijitihâd », mais la boîte de pandore de toutes les formes d’instrumentalisation politique de la Charia dans les sociétés contemporaines.

La diversité de la Charia

D’une part, le droit musulman n’est pas homogène et ne forme nullement un bloc uniforme, comme pourraient le laisser penser les avis à l’emporte-pièce de certaines organisations islamistes ou de certains théologiens contemporains.

Ce droit n’est pas unifié entre les différentes écoles juridiques et, même au sein d’une même école, il existe des divergences importantes concernant la mise en œuvre pratique des règles communes.

D’autre part, les avis juridiques sont soumis à un processus rigoureux d’élaboration qui écarte toute improvisation et tout jugement hâtif ou définitif concernant un cas particulier ou une affaire à juger. Les précautions méthodologiques qui entourent la réflexion et l’application aux cas pratiques sont nombreuses et très strictes. Elles permettent à la fois un respect des fondements du droit musulman et une adaptation au contexte social et aux conditions de vie des Musulmans, selon les régions et les époques. Cette adaptation du droit au contexte fait même l’objet de règles spécifiques dans chaque école juridique.

Ce souci de rigueur et d’adaptation touche des jugements emblématiques de la Charia, tels que le fait de « couper la main du voleur  », qui continuent de susciter des débats houleux et une opposition farouche au sein des sociétés musulmanes et non-musulmanes. Or, cette question est très controversée entre les jurisconsultes et reçoit des avis divergents. Par exemple, les juristes hanafites s’opposent à cette sanction en dessous d’un certain montant volé. Ils l’interdisent même quand le vol intervient au sein d’une même famille et que le voleur peut restituer les sommes ou les biens volés. C’est le cas également chez les jurisconsultes malékites qui recommandent de « ne pas couper la main du voleur » (règle 249).

L’achat et la consommation de vin fait l’objet de débats analogues. Ainsi, les théologiens hanafites s’accordent sur l’interdiction de « l’achat direct » mais divergent sur l’autorisation de « l’achat indirect » (règle 184). Ils divergent également sur la possibilité de consommer un peu de vin sans tomber dans l’ivresse qui fait perdre la raison (règle 203).

Chez les jurisconsultes chaféites également, les exceptions à la règle énoncée sont très nombreuses (ex. règles 557 à 567). Ils recommandent par exemple de prier sur tous les morts, musulmans comme non-musulmans, et de leur offrir une sépulture honorable, y compris lorsqu’il n’est pas possible de connaître la religion des disparus (règle 569). Contrairement à d’autres écoles juridiques, ils font également prévaloir le devoir d’obéissance aux parents sur l’obligation du « jihad » (règle 571).

Si de tels avis juridiques placent les écoles chaféites et hanafites parmi les plus souples et les plus ouvertes, il n’en reste pas moins que toutes les écoles présentent des principes généraux qui autorisent une grande latitude d’interprétation et d’effort personnel (ijtihâd), qui tranche avec le rigorisme ou l’extrémisme que l’on peut constater de nos jours chez certains théologiens de la tendance salafiste ou littéraliste.

Par exemple, le principe de prééminence de la permission sur l’interdiction (règle 13) et celui de la nécessité qui lève l’interdit (règles 123 et 408), autorisent quasiment tous les accommodements et toutes les possibilités d’adaptation aux contextes socioculturels et aux situations individuelles.

On constate ainsi des divergences d’interprétation non négligeables en ce qui concerne les détails d’application des « piliers » mêmes de l’islam (prière, aumône, pèlerinage, jeûne), mais aussi concernant des aspects très importants de la vie courante et des relations sociales et interpersonnelles : mariage, dot, répudiation, fornication, etc.

En réalité, la lecture attentive de ces avis montre que, quelle que soit la question posée, il existe une multitude de règles potentiellement applicables et que la règle juridique finalement retenue est diversement appréciée selon les écoles et selon les jurisconsultes.

Cette diversité juridique et cette flexibilité pratique sont les deux traits qui caractérisent, fondamentalement, le droit musulman à ses origines.

Ils expliquent, en grande partie, son implantation au fil des siècles sur d’immenses territoires et dans des sociétés aussi différentes que celles d’Afrique subsaharienne, du Moyen-Orient et du Sud-est asiatique.

Un droit musulman ad hoc, qui tranche avec l’intransigeance fanatique des islamistes du Califat.

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Mathieu Guidère

Islamologue - Professeur à l'Université de Paris VIII (FRANCE)

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