Le 20 janvier 2018, la Turquie déclenchait l’opération « Rameau d’olivier », dans le but de sécuriser les frontières de la Turquie en en écartant les puissantes milices du YPG, qu’Ankara considère comme la branche syrienne du mouvement indépendantiste kurde, le PKK.
Pour ce faire, la Turquie s’appuie, comme en 2016 lors de l’opération « Bouclier de l’Euphrate » (qui avait réussi à empêcher la jonction des forces kurdes d’Afrin avec les forces kurdes de l’est du Rojava), sur un ensemble de forces rebelles syriennes alliées, parmi lesquelles une partie pro-turque des reliquats de l’Armée syrienne libre (ASL) et des factions islamistes proches ou issues d’Ahrar as-Sham, voire également des unités de la coalition islamiste et djihadiste Hayat Tahrir as-Sham.
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Pendant les huit premiers jours de l’offensive, malgré de puissants bombardements, l’avancée de l’armée turque a été presque nulle, les Kurdes s’étant solidement fortifiés et opérant des contre-attaques efficaces. Les combats se sont concentrés essentiellement sur trois fronts : le front-ouest, dans la région de Rajo ; le front-nord, près du village de Bulbul ; et le front-est, près du bastion rebelle d’Azaz.
À partir du 28 janvier 2018, les opérations turques deviennent plus méthodiques et les troupes avancent, bien que lentement, sur les trois fronts. Les monts Bursaya, verrou au nord-est, sont pris le 28 janvier ; Bulbul est ainsi conquise à son tour, le 1er février, de même que des hauteurs stratégiques sur le front-ouest.
Malgré une résistance étonnante face à la puissance de feu turque, les Kurdes du YPG se retrouvent isolés sur le plan diplomatique : la Russie ne souhaite pas fâcher le président Erdogan dont elle a besoin pour parvenir à un règlement global du conflit syrien ; et les Américains, pourtant alliés des YPG (et des SDF, les Forces démocratiques syriennes, dont les Kurdes du YPG constituent l’essentiel du contingent et qui ont fait office de troupes au sol dans la lutte contre l’État islamique), ont cependant déclaré qu’ils n’étaient pas concernés par la région d’Afrin, la livrant ainsi de facto aux forces turques.
En outre, les Kurdes ont pour l’instant refusé de laisser pénétrer dans les zones qu’ils contrôlent les forces gouvernementales syriennes de Bachar al-Assad, qui pourraient pourtant leur servir de bouclier. Le président syrien voudrait en effet saisir l’occasion pour reprendre position dans le nord du pays, et n’est quoi qu’il en soit pas mécontent de voir le YPG, cette encombrante milice séparatiste, affaibli par les combats.
Il est donc probable que, dans les conditions actuelles, les Turcs continuent leur progression vers la ville d’Afrin, à moins qu’ils ne se contentent d’une zone de sécurité d’une vingtaine de kilomètres, ce qui aurait quand même pour avantage de relier les zones rebelles pro-turques d’Azaz avec celles d’Idlib.
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On voit mal comment les SDF et YPG pourront continuer à ignorer la protection diplomatique que pourrait leur apporter le gouvernement syrien et son allié russe, les États-Unis étant, eux, dans l’incapacité d’intervenir contre la Turquie, leur allié dans l’OTAN.