Pas de « printemps marocain » pour Mohamed VI…
Après avoir attendu le temps d’apprécier la situation et avec l’espoir que la contestation s’épuiserait d’elle-même, les autorités marocaines ont commencé de réprimer avec brutalité les manifestants qui avaient soulevé plusieurs agglomérations du Rif, dans le nord du pays, contre le Makhzen et la corruption de l’État, un mouvement déclenché par la mort d’un habitant d’al-Hoceima, décédé dans des circonstances encore mal établies, il y a plusieurs mois.
Le mouvement, spontané, s’apparentant davantage à une révolte qu’à une révolution, n’a finalement pas été suivi par les Marocains et n’a pas dépassé les frontières de cette région particulièrement pauvre, même si quelques troubles ont touché les banlieues de plusieurs grandes villes, notamment à Rabat, la capitale, Marrakech et Casablanca, où des sit-in en soutien à la rébellion du Rif ont été dégagés sans ménagement par les forces de police.
Le leader de la contestation, Nasser Zefzafi, qui se cachait depuis quelques jours, a été appréhendé le 29 mai et incarcéré. Depuis qu’il avait pris la tête des opposants au Makhzen, il n’avait eu de cesse de dénoncer dans ses discours et sur les réseaux sociaux la dictature exercée par la monarchie, l’oppression par l’État policier et la torture, systématique dans les prisons de ce pays qui, promulguant une législation de façade respectueuse des Droits de l’Homme et « naïvement » saluée par la communauté internationale, en réalité, ne renonce pas aux pratiques en vigueur.
Nasser Zefzafi risque jusqu’à trois ans de prison, notamment pour avoir interrompu le prêche de l’imam de la principale mosquée dal-Hoceima : « Est-ce que les mosquées sont faites pour Dieu ou le Makhzen ? », s’était-il exclamé. Il s’avère en effet que les autorités, via le ministère des Affaires islamiques, a ordonné aux prédicateurs officiels de prêcher contre la rébellion.
Constatant à la fois l’absence de projet politique bien défini du mouvement Hirak (« la mouvance »), qui s’est peu à peu structuré au fil des mois, et l’indifférence dont fait preuve la majorité de la population marocaine, le pouvoir a donc décidé de sévir… comme à son habitude.
Déployant des centaines de policier et de militaires, le gouvernement marocain semble déterminé à en finir sans plus tarder avec la révolte du Rif, maintenant que son unique figure de proue a été neutralisée.
Plusieurs dizaines de personnes ont déjà été arrêtées.
La fameuse « exception marocaine » s’affirme une fois encore et la question demeure : les Marocains aimeraient-ils leurs chaînes ?