Nouvelle page de la contestation du Rif. Une page assez comparable aux précédentes du genre, qui permet de confirmer les méthodes de l’appareil d’État marocain à l’encontre des mouvements contestataires.
Cette fois-ci, ce sont de nouvelles manifestations (désormais officiellement « interdites ») à Al-Hoceïma qui ont fait l’expérience de la palette étendue des tracasseries et empêchements que met en oeuvre le Makhzen. Forces de l’ordre déployées en force partout dans la ville, journalistes peinant à se connecter à Internet, réseau téléphonique « perturbé », trains et convois de manifestants arrêtés, gaz lacrymogènes… et véhicules lancés à toute allure pour disperser la foule… Tout était au point pour que la grande marche prévue le jeudi 20 juillet rassemble le moins de personnes possible et que sa médiatisation soit, de fait, quasi nulle.
Il faut à ce propos constater que la plupart des médias européens font très peu cas de ce « printemps marocain ».
Ce mouvement de contestation, qui se structure politiquement autour du mouvement Hirak, connaît depuis huit mois une évolution progressive de ses objectifs. Il s’agissait initialement d’exiger le développement économique de la région marginalisée d’Al-Hoceima dans le nord du pays, mais le mouvement a perduré malgré la promesse d’un plan d’investissements formulée par le gouvernement marocain. Le mois de mai 2017 a été marqué par le durcissement des autorités avec l’arrestation des leaders du mouvement. Désormais, c’est la libération de Nasser Zefzafi et de plus de 150 autres opposants qui est devenue le leitmotiv de la contestation.
Ces personnes sont accusées « d’atteinte à la sécurité intérieure de l’État ». Pour rappel, Nasser Zefzafi, chômeur et leader du mouvement, a été arrêté parce qu’il avait contesté le prêche d’un imam qui appelait les révoltés à mettre fin à leur mouvement. Au Maroc, les prêches des imams sont rédigés par le ministère des Affaires islamiques, qui dépend du palais…
Selon un dernier bilan officiel, 176 personnes ont été placées en détention préventive ; 120 sont actuellement jugées. Des peines allant jusqu’à vingt mois de prison ont été déjà prononcées en première instance.
Ces méthodes posent toutefois question quant à leur efficacité sur le long terme, car comme le demande le quotidien Al Massae, « L’État sait-il que les arrestations et l’utilisation de la force contre les militants du Hirak ont participé à renforcer la solidarité autour de ce mouvement ? » Et y participent encore ?