Alors que le conflit syrien prend fin par la victoire programmée du régime de Bashar al-Assad et que, l’État islamique (EI) vaincu, on pensait la coalition internationale menée par Washington sur le départ, une série d’interventions militaires se sont succédées en quelques jours, en ce début février 2018, impliquant sur le territoire national syrien les forces armées des États-Unis, de la Russie, de l’Iran, d’Israël et de la Turquie.
Mais surtout, il semble que cette suite d’événements, qui ont tout l’air de ripostes menées de concert par les alliés des deux camps en présence, ait eu pour déclencheur les bombardements opérés par l’aviation américaine le 7 février 2018, lesquels ont ciblé, sur le sol syrien toujours, des unités de volontaires pro-gouvernementales qui progressaient depuis Deir ez-Zor en direction du nord-est de la Syrie, région actuellement sous contrôle des Forces démocratiques syriennes (FDS), coalition de milices dont la grande majorité est constituée des troupes kurdes du YPG (branche syrienne du PKK).
Depuis le début du mois de février 2018, en effet, l’armée syrienne a lancé de larges offensives sur les zones encore sous contrôle des rebelles, à savoir les deux poches aux mains de factions djihadistes coalisées, la Ghouta orientale (dans le sud du gouvernorat de Damas) et le gouvernorat d’Idlib (sur lequel l’étau se resserre depuis les offensives de décembre 2017), s’apprêtant enfin à réinvestir les régions du nord, encore tenues par les Kurdes du YPG mais désormais sous le feu de l’armée turque (en cela alliée indirecte de Damas).
Les bombardements américains du 7 février, qui auraient tué une centaine de combattants pro-Assad, avaient ainsi pour but de protéger les FDS d’une attaque ordonnée par le régime, et plus particulièrement de soutenir le YPG, principal allié de la coalition internationale menée par les États-Unis contre l’EI (et par ailleurs attaqué, dans le nord-ouest syrien, depuis le 20 janvier 2018, par l’offensive turque baptisée « Rameau d’Olivier » qui vise à éliminer ces milices kurdes qualifiées de « terroristes » par le gouvernement turc en lutte contre le PKK sur son propre territoire). L’armée régulière syrienne se prépare effectivement à traverser l’Euphrate, qui délimite la zone d’influence américaine, au nord du fleuve (les zones kurdes), et le territoire déjà reconquis par le régime syrien avec l’aide de la Russie ; un demi-millier d’hommes, y compris des soldats de l’armée du régime, avaient ainsi commencé la manœuvre de franchissement de l’Euphrate, pour reprendre le nord du pays aux rebelles du YPG, et notamment la région pétrolière de Kusham.
Cette violation américaine de la souveraineté nationale syrienne a fait l’objet de protestations de la part du gouvernement syrien et a immédiatement reçu réponse de Moscou, l’allié privilégié du régime : alors que, suite à la destruction d’un avion de combat russe dans la région d’Idlib, le 3 février, et ce par un groupe rebelle djihadiste présumé pro-turc, la Russie avait décidé de limiter les zones dans lesquelles l’offensive turque pouvait se déployer sur le sol syrien, Vladimir Poutine a aussitôt autorisé l’aviation turque à étendre ses bombardements sur les positions du YPG, qui se sont ainsi brusquement intensifiées, le 9 février, dans la région d’Afrine et sur la ville elle-même.
Les gouvernements turc et russe, dès le lendemain des bombardements américains (le 8 février), avaient par ailleurs annoncé la tenue d’un important sommet relatif à la tournure prise par la situation en Syrie, qui doit avoir lieu dans les plus brefs délais, en Iran et avec la participation du président Rohani (l’autre grand allié du régime de Bashar al-Assad).
Or, le 10 février 2018 (au lendemain des bombardements turcs sur les positions du YPG dans la ville d’Afrine), l’État d’Israël a lancé une frappe sur une base syrienne, en représailles à la violation de l’espace aérien israélien par un drone iranien, selon les affirmations de Tel-Aviv. Des affirmations démenties par Téhéran qui nie fermement avoir survolé le territoire israélien et dénonce l’absurdité du casus belli avancé par Israël. Lors de l’attaque, la défense aérienne syrienne (équipée depuis 2017 de missiles de dernière génération livrés par l’armée russe) a répliqué à l’agression israélienne, abattant un avion de chasse israélien F-16 (qui s’est écrasé en territoire israélien, à l’est de Haïfa ; l’un des deux pilotes, qui se sont éjectés, serait grièvement blessé). Israël a renchéri en frappant, le jour même, plus d’une dizaine de positions de l’armée syrienne et des milices iraniennes, à proximité de la capitale, Damas… Le gouvernement libanais a déposé plainte auprès du Conseil de Sécurité de l’ONU contre la violation de son espace aérien par l’aviation israélienne, qui a survolé le territoire du Liban pour mener ses attaques contre la Syrie.
Il va sans dire que l’ampleur, inégalée dans le passé, de l’intervention israélienne, qui incrimine ouvertement l’Iran, et la chronologie des événements interpellent l’observateur.
Washington a immédiatement (dès le 10 février) déclaré approuver et soutenir les frappes israéliennes.
Ainsi, alors que tout semblait plié et que l’armée syrienne, appuyée par ses alliés libanais pro-iraniens du Hezbollah, par des milices iraniennes et, surtout, par l’armée russe, achève l’inexorable reconquête du territoire national syrien, les récents rebondissements militaires qui surviennent en Syrie posent question.
Assiste-t-on à un simple baroud d’honneur de la part de l’administration Trump, impuissante, d’une part, au regard du droit international (qui consacre la souveraineté nationale syrienne et la légitimité du gouvernement de Bashar al-Assad) et face à la présence de la Russie en Syrie et, d’autre part, qui tenterait « simplement » de compenser ses échecs cumulés en matière de politique intérieure par quelque coup d’éclat médiatique, à l’instar de la crise qui oppose de plus en plus dramatiquement les États-Unis et la Corée du Nord ?
Ou bien s’agit-il, plus sérieusement, d’une réelle recrudescence du conflit syrien, le début d’une escalade voulue par Washington, dans le cadre de la néo-guerre froide qui couve depuis que Vladimir Poutine a redressé économiquement et militairement la Fédération de Russie, restaurant ainsi son statut de puissance mondiale face à l’OTAN et à l’Union européenne, et dont la guerre civile ukrainienne a constitué le premier acte violent avéré ?
3 Comments
Tant que Béchar est au pouvoir il y aurait pas de paix en Syrie. La Syrie sera divisée en 03 pays. Les chiites, les sunnites, les kurdes. Ainsi que l,Irak. La Palestine prendra son indépendance avec ses nouveaux pays.
Kadhafi n’est plus au pouvoir, qu’elle est la situation de la Libye aujourd’hui?
Saddam n’est plus au pouvoir, où en est la situation de l’Irak?
Morsli élu démocratiquement puis écarté et emprisonné où est la liberté démocratique recherché par les égyptiens?
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