CMO-MOC – Notre correspondant a-t-il été exécuté par l’armée du Sud-Soudan ?

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Le samedi 26 août 2017, Christopher Allen, correspondant du Courrier du Maghreb et de l’Orient (CMO), a trouvé la mort au Soudan du Sud.

Christopher, titulaire de la double nationalité états-unienne et britannique, était « embedded » avec les rebelles qui s’opposent à la dictature du président Salva Kiir, un conflit oublié.

Notre jeune collègue (26 ans) avait en effet décidé de se consacrer à mettre en lumière les zones de conflit que le courant médiatique dominant avait désertées. Ainsi, après avoir couvert en freelance pendant trois ans la guerre civile en Ukraine (où il avait été le correspondant d’Al-Jazeera, The Telegraph, Vice News, The Independent), Christopher Allen avait intégré l’équipe du CMO, dont il fut l’envoyé spécial en Turquie : présent aux côtés des civils kurdes bombardés par le régime de Recep Tayyip Erdogan, Chris avait rapporté la terrible réalité de cette autre « guerre oubliée », la destruction de sept villes kurdes de Turquie et la résistance des combattants du PKK.

Le 2 août 2017, Chris est entré au Sud-Soudan en franchissant la frontière ougandaise pour rejoindre une unité de la rébellion soudanaise. Après trois semaines d’investigation, il a perdu la vie au cours de combats, dans la ville de Kaya, où s’affrontaient les troupes du gouvernement et la brigade rebelle dont il suivait les opérations.

Lorsque les échanges de tirs ont pris fin, a déclaré le commandant des forces gouvernementales engagées contre les rebelles, les corps des victimes ont été relevés. Trois soldats du gouvernement avaient été tués et seize membres de la rébellion. C’est à ce moment-là, selon le porte-parole de l’armée du Sud-Soudan, que les militaires ont découvert qu’un « blanc » gisait parmi les cadavres des rebelles.

L’armée sud-soudanaise a alors transporté le corps de Chris jusqu’à la capitale du Sud-Soudan, Juba, où il a été identifié par l’ambassade des États-Unis.

Selon le porte-parole des rebelles, Chris a été pris pour cible par l’armée du gouvernement sud-soudanais et délibérément exécuté d’une balle dans la tête, alors qu’il filmait les combats.

Le ministre de l’Information sud-soudanais a rejeté ces accusations, affirmant que rien n’avait permis de distinguer le journaliste des combattants rebelles et qu’il avait donc été confondu avec les miliciens qu’il accompagnait : « Toute personne qui se trouve dans le camp opposé est une cible », a précisé le ministre Michael Makuei. « Et si Monsieur Allen couvrait les activités des rebelles, alors, il était clairement un rebelle lui-même. »

Pourtant, selon le colonel Paul Lam Gabriel, porte-parole de la rébellion, Chris portait au moment des faits une veste sur laquelle figurait une large inscription : « PRESS ».

La rédaction du Courrier du Maghreb et de l’Orient confirme cette information : le reportage de Chris au Sud-Soudan avait été préparé de longue date et la nécessité impérative pour notre correspondant de porter en permanence un insigne l’identifiant comme non-combattant avait fait l’objet d’une intense insistance, et de la part de Chris lui-même qui s’était muni d’un vêtement adéquat.

Peut-être, si elle n’a pas été détruite, la caméra de Chris fournira-t-elle à l’enquête des images et une réponse à la question que la rédaction du CMO pose désormais : notre correspondant a-t-il été exécuté par l’armée du Sud-Soudan ?

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